Mgr Felix Gmür, évêque diocésain / Photo: Pascal Tissier

Les 500 ans de la Réforme: une raison de célébrer ?

2017: 500e anniversaire de la Réforme. Et nous, catholiques, devons-nous aussi participer à cette célébration ? L'évêque diocésain, Mgr Felix Gmür, nous éclaire à ce sujet dans sa lettre pastorale du 12 février dernier, dont voici quelques extraits.

Toute personne qui célèbre la Réforme veut mettre en évidence les développements et les acquis positifs du processus de réformation qui a débuté il y a 500 ans. Ce qu'il y a eu de nouveau et de novateur pour les contours de la foi et de la vie chrétienne est reconnu. Des réformes et un renouveau étaient nécessaires, en ce temps-là, comme ils le sont aujourd'hui. Sinon, c'est la stagnation ou l'égarement qui nous menacent. La stagnation signifie que l'Eglise cesse de se purifier. Elle s'éloigne alors de son origine et des gens. Elle devient une étrangère. La personne croyante peut rencontrer Dieu directement et librement. Les réformateurs ont fortement insisté sur ce point, car l'Eglise catholique prenait la direction de la déchéance spirituelle et morale; elle avait effectivement besoin d'une purification. C'est Dieu qui est au centre et non les détenteurs d'un pouvoir séculier, et surtout pas ceux qui portent l'habit ecclésiastique. Cette revendication des réformateurs va tout à fait dans le sens de la 1re lettre aux Corinthiens (cf. 1 Co 2,7) : la première place revient à Dieu. C'est pourquoi il faut évaluer tous les efforts de réforme en se demandant s'ils conduisent au Christ ou non. "Solus Christus", "le Christ seul" est un maître mot de la Réforme qui est toujours valable aujourd'hui et pour lequel nous pouvons être reconnaissants.

Changements inhérents à la vie
Les processus de réforme qui veulent revenir au Christ contiennent des correctifs nécessaires. Ils nous préservent des égarements et apportent à l'Eglise fraîcheur et vitalité. Il y a toujours eu et il y aura toujours des réformes dans l'histoire de l'Eglise. Là où elles offrent de l'espace à l'action de l'Esprit Saint en opérant un discernement intelligent et mesuré, elles purifient la communauté ecclésiale. Elles fortifient l'annonce de l'Evangile en parole et en acte. Toutefois, lorsque les fronts se durcissent, quand apparaissent des conflits qui semblent insurmontables, lorsque des partenaires de dialogue deviennent des ennemis, la lutte pour la vérité de la foi et pour la juste forme à donner à l'Eglise peut déboucher sur une division.

Unité: ça veut dire quoi ?
Il est nécessaire de clarifier ce que signifie l'unité. L'objectif de l'œcuménisme n'en sera que plus clair lui aussi. C'est le réformateur Martin Luther qui a dit que ce n'est que la foi, la foi seule, qui sauve. Or cela implique une même confession de foi, qui fasse autorité par tous. La confession de l'Eglise comme Corps du Christ fait également partie de la confession de foi. Les Eglises catholique et orthodoxe sont fermement convaincues que l'unité doit prendre une forme visible: visible dans la confession de foi, visible dans les célébrations des sacrements, visible dans l'action caritative, visible dans les ministères et les structures de l'Eglise. Dans l'Evangile selon saint Jean, Jésus prie le Père avec ces mots: "Qu'ils parviennent à l'unité parfaite et qu'ainsi le monde puisse connaître que c'est toi qui m'as envoyé et que tu les as aimés comme tu m'as aimé" (Jn 17,23). C'est précisément pour que le monde puisse connaître cela que la visibilité est nécessaire. Pour que l'Eglise - une - puisse accomplir sa mission, elle doit être visible, reconnaissable comme une seule "marque", saisissable comme une seule chrétienté.
J'ai parfois l'impression que nous nous arrangeons bien entre nous et qualifions le résultat de diversité, de pluralité, de variété, d'Eglises multicolores. Cependant, nous risquons de nous obstiner dans la multiplicité et de nous y perdre. En restant dans nos différences, nous nous entendrons bien, mais l'unité réconciliée fait encore défaut. L'intégration de la diversité dans l'unique Eglise Corps du Christ est nécessaire. Aucun de nous ne peut rester indifférent lorsque des chrétiens se querellent. Ni quand, aujourd'hui encore, des chrétiennes et des chrétiens sont persécutés dans de nombreux pays. Etre tous prêts à agir en communauté est le premier pas pour surmonter les différences. Que nous soyons engagés professionnellement au service de l'Eglise ou bénévoles, nous pouvons tous nous engager dans des manifestations ou des projets interconfessionnels. La prière de Taizé est un bon exemple. Dans la louange commune de Dieu, notre centre commun devient perceptible. C'est le Christ qui nous unit les uns aux autres. Il n'est pas divisé (cf. 1 Co 1,13).

A la fin de cette année, la rencontre européenne des jeunes, organisée par Taizé, aura lieu à Bâle. Des jeunes chrétiennes et chrétiens de différentes confessions prieront ensemble. C'est par de tels événements que nous pouvons particulièrement ressentir que nous faisons route ensemble sur de nombreux chemins.
Le travail des œuvres d'entraide chrétiennes peut aussi être cité en exemple dans ce domaine. "Action de Carême" et "Pain pour le prochain" en donnent un témoignage crédible depuis des décennies.

Et la Réforme, en tant que catholiques ?
Nous sommes reconnaissants pour la nouvelle impulsion qui souligne que le Christ seul signifie notre salut. Nous remercions Dieu des multiples témoignages de foi des chrétiennes et chrétiens réformés. Nous nous réjouissons de l'orientation radication sur la Parole de Dieu et de la nouvelle valeur accordée au peuple de Dieu. Nous commémorons la Réforme en agissant ensemble en faveur de l'unité. Nous croyons et confessons notre foi ensemble. Nous souffrons aussi ensemble parce que tout n'est pas encore possible. Et, surtout, nous prions ensemble. La prière est la célébration de la miséricorde de Dieu. Dans cette perspective, non seulement nous pouvons, mais nous devons célébrer ensemble !

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