Méditation: Homosexualité et société

Pour moi, méditer un sujet, c'est décider de ne pas tirer de conclusions, c'est décider de laisser le sujet continuer à m'occuper. Je vous invite à une méditation sur le thème " homosexualité et société ". Elle n'est toutefois pas isolée puisque notre pape François se pose lui-même des questions.

"La Bible n'est pas un distributeur automatique de réponses." (Cardinal Walter Kasper, 09.09.2015, cité par www.cath.ch)

Nous avons assez de données scientifiques pour savoir que l'homosexualité fait partie de la nature. Quelqu'un qui voudrait connaître les nuances de l'homosexualité humaine (exclusive, bisexualité, ...) trouvera des articles intéressants sur internet. Aussi sur le plan quantitatif existent toutes sortes de théories. Env. 5% d'orientations homosexuelles exclusives est un chiffre qui me semble valable. Cela signifie que ce n'est pas anodin, mais aussi qu'il s'agit d'une tendance minoritaire.

A travers l'Histoire et la géographie, l'homosexualité n'est pratiquement jamais une évidence (même dans la Grèce antique, l'homosexualité est très codifiée) et aujourd'hui sur les env. 195 pays reconnus, env. 100 répriment pénalement l'homosexualité. Les condamnations bibliques ne sont donc pas isolées. Mais pourquoi donc une minorité d'adultes consentants (je ne parle que d'eux) sont-ils rejetés à travers pratiquement toutes les cultures ?
La réponse qui vient en premier à l'esprit est qu'une société humaine (comme le règne animal dont elle fait en quelque sorte partie) est tournée vers la reproduction de l'espèce. Mais cette réponse n'explique pas le rejet, sinon la haine dont les homosexuels peuvent être victimes. Car si la majorité des scientifiques pensent qu'il n'existe pas d' " homosexualité " exclusive dans le règne animal (en dehors de l'humain), il ne semble pas non plus qu'il existe de violence particulière envers un individu qui flirte momentanément avec un individu du même sexe. Alors pourquoi l'homosexualité humaine, en particulier masculine, éveille-t-elle souvent tant d'aversion ?

L'expérience m'a montré que la construction d'une personnalité est complexe et fragile. Tout être humain prudent sait par exemple que - d'une manière générale - rien n'est jamais acquis dans la vie. Ce n'est pas parce qu'on n'a jamais fait quelque chose qu'on peut être sûr qu'on ne le fera jamais. Et j'ai le sentiment que pour compenser nos incertitudes intérieures, nous avons besoin d'être sûrs de certaines choses. La certitude de sa sexualité est probablement fondamentale à l'équilibre de l'immense majorité des personnes, en particulier des hommes. Et j'ai l'intuition que l'homosexualité (qui ne fait de mal à personne) est ressentie comme menaçante pour l'identité sexuelle du plus grand nombre. Il existe d'ailleurs des scientifiques affirmant que la majorité humaine serait bisexuelle. Ce ne sont toutefois ni les éventuels non-dits, ni les statistiques qui m'intéressent vraiment. Ce qui m'interroge le plus, c'est le rejet presque systématique par l'immense majorité d'une (petite) minorité inoffensive. Et ici, j'ai l'intime conviction qu'on ne peut en réalité rien changer en profondeur. L'être humain avec ses angoisses est ce qu'il est. Donc même si je suis heureux qu'une société fasse de la place aux homosexuels, je me demande pourquoi elle le fait maintenant. Serait-elle devenue plus généreuse, plus ouverte ? Je n'y crois pas un instant et c'est bien là la source de mes craintes pour les homosexuels. Je crois en effet que c'est justement parce que la société occidentale est tendanciellement plus égoïste, moins prête à contribuer à sa propre construction qu'elle reconnaît brusquement à chacun le droit de faire ce qu'il veut.

Ce n'est pas pour me rassurer et la naïveté des associations homosexuelles me laisse perplexe. Car l'Histoire ne s'arrête jamais. Après une tendance suit souvent son contraire. La méditation d'un théologien chrétien inclut évidemment sa foi. Je fais partie de ceux qui pensent et qui ont toujours pensé que Dieu voulait la vie de tous, surtout quand la vie des uns ne représente pas de danger pour les autres.
Mes questions finales et ouvertes (comme le sont probablement celles du pape François) sont les suivantes :

1. Sous le regard de Dieu, comment être respectueux d'une minorité en dehors d'une mode, d'une tendance ?

2. Sous le regard de Dieu, comment expliquer qu'un couple homosexuel peut être juridiquement respecté sans qu'il emprunte les formes d'un couple hétérosexuel ?

3. Sous le regard de Dieu, comment conseiller à chacun de traiter avec prudence un sujet délicat à travers toute l'Histoire ?

Cela fait env. 3000 ans que le peuple de Dieu marche consciemment avec lui. Ce peuple a eu des hauts et des bas, il a connu le respect et le rejet. Puisse notre Dieu continuer à nous guider vers sa Vie comme il l'a toujours fait, sans peur mais en se gardant de solutions imprudentes.

Abbé Patrick Werth

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