Séparer le Christ de son Eglise conduirait à une falsification tant de l'un que de l'autre. Le Christ sans l'Eglise est une réalité facile à manipuler et vite déformée selon les goûts de chacun. Vice-versa. Une Eglise sans le Christ se réduirait à une structure purement humaine. Donc, être chrétien doit aller de pair avec une insertion dans son Eglise.
Tertullien, un des premiers théologiens et Père de l'Eglise, a très justement écrit : " On ne naît pas chrétien, on le devient ". La formule a beau dater du 3e siècle, elle est toujours vraie. Cependant, beaucoup de gens continuent de penser qu'il suffit d'être né(e) dans une famille chrétienne, dans un pays chrétien ou d'avoir été baptisé(e) bébé pour être chrétien(ne) à leur tour. D'autres se rassurent en portant une croix à leur cou ou en plaçant un crucifix au-dessus de leur porte d'entrée. Sans compter ceux et celles qui se tranquillisent en allant à l'église, au moins deux fois par an... !
Devenir chrétien est donc nécessairement un choix personnel et un engagement que personne ne peut prendre à notre place. Même les cérémonies religieuses ne se substitueront jamais à une décision que nous sommes seuls à pouvoir prendre. Devenir chrétien, c'est, en quelque sorte, capituler devant le Christ. Cela exige de choisir de lui obéir, de vivre pour Lui et avec Lui. Saint Paul utilise cette magnifique expression:" Christ en nous" (Col 1, 27) pour indiquer la réalité qui en découle. A partir de ce moment-là, vous devenez chrétien!
Si les chemins sont variés pour devenir chrétien, aujourd'hui plus qu'hier, nous vivons et évoluons dans un milieu pluriculturel, multi-religieux, enrichissant dans sa diversité, mais où il n'est pas facile d'être chrétien. Le chrétien s'interroge et est interrogé dans sa foi par son entourage. Ces confrontations sont autant de prises de conscience du sens de sa vie. Beaucoup de loisirs s'offrent à nous. Les emplois du temps s'en trouvent de plus en plus compliqués à gérer. Nous " zappons " d'une activité à l'autre et la foi est considérée comme une activité supplémentaire. Dans notre monde agressif et agressé, dans le concret de nos vies quotidiennes où la peur du terrorisme s'invite dans nos cœurs, savons-nous toujours voir et regarder l'autre comme un être humain et le respecter comme tel ? Oui, voir et regarder l'autre comme un frère ou une sœur... voilà l'exigence pour devenir chrétien!
On ne naît pas chrétien, on le devient. Effectivement. Parce que la foi n'est pas un acquis, mais une rencontre avec Jésus le Christ, qui doit être soutenue par des actes concrets. On peut avoir dans sa famille des papes, des évêques, des prêtres, des religieux ou religieuses, des pasteurs, des agents pastoraux, avoir une religion et avoir été baptisé, mais sans être un véritable chrétien. Être chrétien, être disciple de Jésus, c'est choisir de fonder sa vie d'homme ou de femme sur le Christ; c'est mettre ses pas dans les siens; c'est "aimer comme je vous ai aimés". Ce choix comporte un risque, celui de la croix, c'est-à-dire de la souffrance, de l'incompréhension, voire des persécutions ou de la mort. Même en ce 21e siècle, des chrétiens témoignent encore de l'Evangile au risque de leur vie. Jésus pose donc à chacun et à chacune d'entre nous une question: qui tient la première place dans ta vie? De qui es-tu au quotidien le disciple? Devenir chrétien, c'est d'abord se reconnaître pécheur devant Dieu et recevoir Jésus-Christ comme son seul moyen de salut. Car l'Evangile n'est pas un système d'articles de foi et de préceptes moraux, encore moins un programme politique, mais bel et bien une personne : Jésus-Christ. Tertullien avait raison, pour être chrétien, il faut d'abord le devenir!
Emmanuel Samusure, animateur pastoral au sein de l'équipe de l'Unité pastorale francophone Bienne-La Neuveville