Saint Nicolas de Flüe, tel qu'on peut le voir dans l'église biennoise de St-Nicolas / Photo: Niklaus Baschung

Saint Nicolas de Flüe: l'homme, le médiateur et le mystique

Le jubilé des 600 ans de la naissance de Nicolas de Flüe offre l'occasion de renouveler la vision sur la vie et l'œuvre de l'ermite du Ranft. Un nouveau livre offre un série d'éclairages sur la personnalité et la postérité du saint patron de la Suisse. Rencontre avec les abbés Bernard Schubiger (BS) et Jacques Rime (JR) qui ont assuré la relecture de l'édition française. Pour eux, Nicolas n'est pas seulement le héros d'un temps fort lointain, mais un homme très moderne sous bien des aspects !

Le jubilé des 600 ans de la naissance de Nicolas de Flüe offre l'occasion de renouveler la vision sur la vie et l'œuvre de l'ermite du Ranft. Un nouveau livre offre un série d'éclairages sur la personnalité et la postérité du saint patron de la Suisse. Rencontre avec les abbés Bernard Schubiger (BS) et Jacques Rime (JR) qui ont assuré la relecture de l'édition française. Pour eux, Nicolas n'est pas seulement le héros d'un temps fort lointain, mais un homme très moderne sous bien des aspects !

Pourquoi ce nouvel ouvrage sur Nicolas de Flüe?

JR: Il s'agit de l'adaptation française de l'ouvrage collectif commémoratif édité en allemand à l'occasion du 600e anniversaire de la naissance de Nicolas de Flüe. Dès le départ le projet devait se faire dans les trois langues nationales: allemand, français et italien. Pour l'édition francophone, il s'agit des contributions écrites en français et du texte de base de Roland Gröbli, auteur de la biographie de Frère Nicolas. Nous en avons été les relecteurs.

BS: L'apport spécifique de la version romande est finalement surtout son illustration. Chaque chapitre a au moins une belle photo en couleur, ce qui rend le livre plus agréable. Le texte complet se limite à 130 pages, alors que la version alémanique en compte le triple. Nous avons douze contributions très variées qui illustrent bien la vie, l'œuvre et la postérité du patron de la Suisse. Le styles sont aussi très différents, biographie, analyse, témoignages, réflexions politiques ou spirituelles.

Le livre tient aussi à donner toute sa place à Dorothée, la femme de Nicolas...

BS: Même si on sait assez peu de choses sur elle, on a tout de même quelques témoignages. Dans l'historiographie, elle a souvent été oubliée ou mal comprise. Jusqu'au XVIIe siècle, elle est celle qui se sacrifie, alors qu'aujourd'hui on la présente comme une partenaire qui joue un rôle déterminant dans l'évolution de la vocation de Nicolas. Les auteurs anciens considéraient aussi que Nicolas s'était uniquement marié par nécessité et par devoir. A cette époque, la seule vocation reconnue et valable pour la sainteté était la vie religieuse dans le célibat. Je pense aussi que c'est l'une des raisons pour lesquelles la béatification a tant tardé, car Nicolas n'était qu'un simple laïc qui, plus est, marié.

Nicolas de Flüe a vécu il y a 600 ans. En quoi sa vie et son exemple peuvent-ils apporter quelque chose à nos contemporains?

BS: J'aime résumer la vie de Nicolas en trois étapes. De l'enfance et de la jeunesse jusqu'à 30 ans, l'âge où il se marie, constitue la première étape. Il y a ensuite 20 ans de vie familiale avec 10 enfants. Puis la rupture, comme il l'appelle lui-même, le 22 octobre 1467, le jour de la Saint-Gall. Il part d'abord en direction de Liestal avant de rentrer et de s'établir comme ermite au Ranft, non loin de sa maison familiale. Il y reste 20 ans sans boire ni manger, ce qui impressionne beaucoup ses contemporains. Dans chacune de ses étapes, on trouve des moments-clés. Un des premiers est, à l'âge de 16 ans, la vision d'une tour élevée dans la vallée du Ranft. On pourrait penser qu'il aurait dû comprendre immédiatement que sa vocation était là, au Ranft. Mais il lui a fallu 34 ans pour réaliser ce que Dieu lui disait et qu'il ne comprenait pas du tout. C'est tranquillisant de constater qu'il faut parfois beaucoup de temps pour trouver vraiment sa voie. Son évolution spirituelle et personnelle est lente et longue.

JR: On peut en dire autant de son fameux jeûne. Il n'a pas commencé subitement mais le pratique depuis sa jeunesse. Il en est de même de la prière. On raconte que quand il était enfant, il aimait déjà se retirer à l'écart pour prier. Un homme en recherche constante de sa voie...

JR: Son parcours de vie est somme toute complexe et sinueux. Dès sa jeunesse, Nicolas est un "Aussteiger" un être à part. Il a un rôle social important: engagé dans sa famille, dans la société. BS: Il siège au Conseil d'Obwald, où il a aussi des fonctions de juge. Pour certains, c'est là qu'il aurait été dégoûté par un certain nombre d'injustices. On pourrait dire qu'il a tout fait à fond: son enfance, sa vie familiale et sa vie d'ermite. Il n'a jamais fait les choses à moitié!

JR: Au plan local en tant que magistrat, Nicolas se trouve à plusieurs reprises confronté à des curés indignes qui surchargent les populations de dîmes et mènent une vie dissolue. Il défend alors les communautés contre les prélats. Ces curés titulaires confient la pastorale à des vicaires "mercenaires" souvent peu formés et guère exemplaires, avec un concubinage assez généralisé... 

Les 600 ans de Nicolas de Flue, l'homme, le médiateur, le mystique
Editions du Parvis Hauteville, 2017, 128 p. 16.- CHF

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