Chr. Elmer

Tous... Saints?

La Toussaint, comme son nom l'indique, est la fête de tous les saints, de tous ceux ayant existé depuis la nuit des temps, et qui baignent dans la Lumière du Christ. Les saintes et les saints connus et reconnus par l'Eglise, et celles et ceux encore ou à jamais inconnus...

La sainteté, fondamentalement, n'a rien à voir avec la notoriété. Un saint n'est pas coiffé d'une auréole. De son vivant du moins... Mais est-on autre chose que vivant, soit dit en passant ? On est vivant ici, puis Vivant après, et c'est la mort qui fait office de passage entre ces deux formes de vie.
La sainteté, c'est surtout dans l'humilité des cœurs et l'apparente banalité des gestes et des paroles qu'elle se tisse et annonce le Royaume. Mais qu'est-ce qui distingue un saint de quelqu'un qui ne le serait pas ? Et si l'on n'est pas saint, qu'est-ce qu'on est donc ? Normal ? Humain ? Pécheur ? Oui. Comme les saints ! Elles et eux, comme nous, normaux (mais la normalité, c'est quoi ?), humains (évidemment !) et pécheurs (mais oui, détrompez-vous, un saint n'est pas parfait). Sainte Thérèse de Lisieux, docteure de l'Eglise, a ainsi défini la sainteté : " Elle ne consiste pas à faire des choses extraordinaires, mais à tout accomplir avec un amour extraordinaire ". C'est l'amour, seulement l'amour, qui semblerait être l'ingrédient spirituel de base de la sainteté. Un amour manifesté dans la relation à l'autre où Dieu fait figure de liant et de ferment.

Mais alors... la sainteté serait-elle à la portée de tous ? Aurions-nous, en tant que baptisés, une vocation à la sainteté ? En porterions-nous les stigmates, quelque part en nous ? Comment insuffler le désir de cette quête dans les âmes des femmes et des hommes d'aujourd'hui ? Comment susciter ce cri du cœur : " Je veux être saint(e) ! ", non par orgueil, mais par pur amour. Au nom de l'Amour incommensurable que Dieu nous voue et au nom de celui, imparfait, fluctuant, mais souvent sincère que nous avons, pensons avoir ou tentons d'avoir pour Lui.
Ce qui nous différencie d'un saint, c'est peut-être cette intensité à vouloir persévérer, coûte que coûte. Un défi de taille, à la mesure de cet Amour qui n'a de cesse d'appeler et de patienter. Il ne s'agit pas d'un sentiment ou d'une émotion, aussi forts soient-ils, mais d'une volonté, d'une ténacité. On veut aimer Dieu éperdument. Se remplir de Lui, en déborder de partout et Le répandre sur les autres. Un amour qui n'aurait évidemment rien de jaloux, rien d'exclusif, rien d'intrusif. Dieu est pour tous. Il est à donner à profusion puisqu'il est Don. Et si d'aventure le saint ou la sainte venait à se perdre un peu en chemin - un saint aussi, un saint surtout, est confronté aux nuits de la foi, à la traversée du désert et du désir, au doute et à toute forme d'égarement - il ou elle finirait par se remettre en route et reprendre l'ouvrage sur le métier. " Amor omnia vincit ". La fidélité, cette volonté d'amour tenace, l'emporte sur toute chose. Il suffit de le vouloir et de vouloir y croire.

La Toussaint, c'est donc plus que la fête des saints et des saintes du ciel. C'est la fête de toutes celles et ceux qui, promis et promus à la résurrection, ont rejoint le Père. Des femmes, des hommes, des enfants, morts avec leurs péchés, morts au péché, relevés par l'Amour. Comme eux, nous entrerons tous un jour dans la danse céleste de la communion des saints, mêlant nos louanges à celles des anges et des élus de tous âges. N'avons-nous pas été choisi(e)s par Dieu ? Chacun de nous n'est-il pas son projet ? Le Christ nous espère aux côtés de son Père !

La Toussaint, le 1er novembre, et la commémoration des fidèles défunts, le 2 novembre, se complètent et s'interpellent. Ce sont des jours consacrés à la Vie. Des jours qui réveillent Pâques. C'est une espérance qui refleurit nos tombes et assèche les pleurs. Devenons saints, nous aussi !
Jour après jour, chaque fois un peu mieux. Et tant pis si parfois on faillit à la tâche et chute en chemin !
Devenons saints, brûlants de ce feu d'amour fou, qui dévore.
Devenons saints ! Faisons-nous, maladroitement peut-être (qu'importe !), prière vivante, mot de pardon, baiser glorifiant, sourire plein de grâce. Et, comme on ne peut garder pour soi ce qu'on a reçu avec amour et joie, on sanctifiera à notre tour, de pécheur en pécheur...
Ainsi va l'amour.
Aimer plus loin que la blessure.
Révéler la sainteté des autres en les aimant sans relâche, voilà notre vocation.

Christiane Elmer

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